Le Point - De la démocrature en Amérique

Enseignant pour un semestre à Princeton, l’écrivain livre une fois par mois ses impressions de voyage. Dernier épisode.

Avant de rentrer en Europe, je grimpe sur un navire avec des centaines de touristes, un matin voilé de la fin juin. Le pont est balayé par une bise bienvenue après des jours de canicule. Solennelle, émouvante, Lady Liberty approche. Elle brandit vers le ciel le flambeau de la liberté recouvert de feuilles d’or et enserre de la main gauche une tablette estampillée de la date de la Déclaration d’indépendance, tel Moïse, descendant du mont Sinaï, les Tables de la Loi : la statue illumine le monde des symboles des Lumières et de la justice. Des Lumières, de la justice, il est question dans le film du musée mitoyen, et, à coups d’images immersives, de l’État de droit, de l’égalité des chances, de la liberté d’expression, de l’émancipation du joug de l’oppression et de la promesse d’un monde meilleur. « La liberté a choisi cet emplacement pour vivre », déclara le président Cleveland le jour de l’inauguration, en 1886. On peut lire une citation d’Édouard de Laboulaye, le commanditaire français du monument, sur un panneau : « Cette statue nous dit que la liberté ne vit que de la vérité et de la justice, de la lumière et de la loi. »

TRISTE LADY LIBERTY